Très prisés des consommateurs, les vins dits « nature » ou « naturels » n’avaient, avant le 3 février dernier, aucune existence, aucun label et cahier des charges.
La mention « Vin nature » pouvait donc être utilisée par tout viticulteur, sans qu’aucun contrôle de loyauté de l’information ne puisse être effectué.
C’était sans compter sur le travail aujourd’hui officiellement reconnu de plusieurs vignerons des Pays de la Loire.
Né le 16 juillet 2019 à l’initiative de Messieurs Sébastien DAVID et Jacques CARROGET, le « Syndicat de Défense des Vins Nature’L » milite pour offrir aux consommateurs une définition et un encadrement des vins nature, sujets à bon nombre de débats.
A ce sujet, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF), a d’ores et déjà été amenée à préciser que la mention « vin nature » n’est pas conforme à la réglementation européenne, contrairement à la mention « vinification sans intrants ».
Au soutien de ses prétentions, la DGCCRF se fonde à la fois sur l’article 53 du règlement délégué 2019/33 qui « permet d’utiliser une mention descriptive faisant référence à la méthode de production du vin », et sur l’article 7 du règlement d’information des consommateurs sur les denrées alimentaires qui implique que « les mentions volontaires ne doivent pas induire le consommateur en erreur et doivent être précises, claires et aisément compréhensibles ».
Ainsi, pour la DGCCRF, le terme « naturel » ne peut s’appliquer qu’à un produit non traité, sans additifs.
Or, compte tenu du mode d’élaboration du vin et de l’ajout d’intrants de type sulfites, ce dernier ne répond pas à cette définition, de sorte que son utilisation sur l’étiquetage est illicite.
Pour faire face à ce vide juridique et au développement de « fausses » cuvées dites « nature », le 3 février dernier, à l’occasion du Salon des Vins de Loire, le Syndicat de Défense des Vins Nature’L présentait une Charte d’engagements définie avec l’aide des services du Ministère de l’Agriculture, de l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) et de la DGCCRF.
Après plus de dix années de travaux de recherche, le vin « nature » bénéficie enfin d’une définition et d’un label officiellement validés par la DGCCRF au début du mois de mars.
Une nouvelle dénomination, compatible avec la réglementation européenne en vigueur est née : le « VIN METHODE NATURE », décliné en deux logos.
Comme le précise Sébastien DAVID, « c’est la première reconnaissance officielle des vins nature. Nos vins nature, jusqu’à présent interdits à la vente sous cette dénomination commerciale, avaient besoin d’un engagement clair et audible ».
Pour ce faire, cette Charte privée reprend les principes proposés par l’Association pour le Vin Naturel qui, il y a déjà dix ans, avait d’ores et déjà cherché à faire reconnaître juridiquement ce concept.
La nouvelle Charte contient douze engagements qui participent de la définition de « Vin méthode nature » :
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100% des raisins (de toutes origines : AOP, Vin de France, etc.) destinés à un vin qui se revendique « Vin méthode nature » se doivent d’être issus d’une agriculture biologique engagée et certifiée (Nature & Progrès, AB, ou 2e année de conversion AB à minima).
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Les vendanges sont manuelles.
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Les vins sont vinifiés uniquement avec des levures indigènes.
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Aucun intrant n’est ajouté.
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Aucune action de modification volontaire de la constitution du raisin n’est autorisée.
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Aucun recours aux techniques physiques brutales et traumatisantes (osmose inverse, filtrations, filtration tangentielle, flash pasteurisation, thermovinification…) n’est permis.
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Aucun sulfite n’est ajouté avant et lors des fermentations (possibilité d’ajustement – de l’ordre de S02 < 30 mg/L H2S04 total, quels que soient la couleur et le type de vin – avant la mise ; obligation d’adjonction de sulfites mentionnée sur l’étiquette via un logo dédié).
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Lors d’un « Salon des Vins méthode nature », les vignerons comme les organisateurs s’engagent à présenter la charte à côté des bouteilles ; leurs cavistes indépendants sont encouragés à faire de même, dans la mesure du possible, au sein de leur établissement.
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Utilisation d’un logo d’identification.
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L’engagement se fera lors de la mise en « commercialisation » (obligation de résultat) par une « déclaration sur l’honneur », faisant suite à l’avis du bureau du Syndicat ; il sera demandé chaque année pour chaque cuvée (lot clairement identifié).
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Les cuvées non « Vins méthode nature » doivent être clairement identifiables (étiquetage différencié) chez les signataires.
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Les signataires s’engageront en leur nom propre et toutes les informations demandées seront mises en ligne
Au-delà de la définition proposée, cette charte met également en place une procédure de contrôle avec notamment des contrôles aléatoires, des contrôles et prélèvements sur site par un Organisme certificateur, la réalisation d’analyses de sulfite ou résidus de pesticides de synthèse sur les cuvées engagées, la mise à disposition par le vigneron de tous les documents de traçabilité du vin ou encore le tirage au sort de trois domaines qui seront contrôlés chaque année notamment sur la traçabilité et la teneur en soufre.
A l’issue de ces divers contrôles, les cuvées validées par le Syndicat pourront arborer le label « Vin méthode nature ». Ceci permettra à la DGCCRF, le cas échéant, s’appuyer sur la définition issue de la Charte pour contrôler et sanctionner les éventuelles tromperies au consommateur.
Pour le Syndicat de Défense des Vins Nature’L, l’objectif affiché est désormais de faire adopter cette Charte par le plus grand nombre de vignerons. A ce jour, une cinquantaine de vignerons sont adhérents au Syndicat, soutenu également par de nombreux professionnels du vin tels des cavistes ou restaurateurs.
Réservée aux vins européens, cette démarche privée sera à l’essai sous l’observation de l’INAO pendant au moins trois années, avant, éventuellement, de devenir réglementaire.